L’Arche de Saint-Antoine l’Abbaye est une maison d’accueil en même temps qu’un rassemblement de personnes magnifiques, à découvrir absolument pour un stage d’été, une retraite hivernale ou une nuit à la volée…
Saint-Antoine l’abbaye est un petit coin de paradis caché entre la Drôme et l’Isère, village médiéval hors du temps fermé aux voitures et aux vicissitudes de la vie moderne. Ses petites ruelles sont agrémentées d’échoppes à l’ancienne : bouquiniste, céramiste, tanneur de cuir ou tailleur de pierres. Au centre se dresse une abbaye démesurée eu égard à la taille du bourg, et pour cause : elle abrite les reliques de Saint-Antoine l’Égyptien, ermite ayant vécu dans le désert de nombreuses années et ayant lutté contre les incessantes visions tentatrices envoyées par le Diable pour le détourner de son chemin de foi (les fameuses « tentations de Saint-Antoine »).
Au Moyen-Âge, les pèlerins affluent de toutes parts pour se faire enlever le « feu Saint-Antoine », mal des ardents donné par l’ergot de seigle qui brûle tout de l’intérieur. Dans l’immense bâtiment qui jouxte l’abbaye se sont installés un hospice et une maison de l’Aumône pour accueillir tous ces malades. Neuf siècles après, ce lieu continue d’honorer sa tradition d’accueil avec l’installation en 1987 de la communauté de l’Arche. Menée par Lanza del Vasto, philosophe formé en Inde à l’approche non violente par Gandhi lui-même, cette communauté regroupe une vingtaine de permanents qui partagent aujourd’hui leur temps entre actions de résistance civile, réflexions et travaux pratiques autour de la notion de vie communautaire et accueil de stages en tous genres : yoga, chant, calligraphie chinoise, danse, mais aussi CNV, vie du couple, éveil spirituel et connaissance de soi.
La fraîcheur du paradis et l’énergie des pratiques
Dès le pallier, on est transporté dans un autre monde : à l’abri des murs épais de l’ancien hospice, la fraîcheur circule librement, portée par le doux bruit d’une petite fontaine. Les plantes soigneusement entretenues tracent un chemin le long des couloirs silencieux, jusqu’à la cour intérieure où l’on mange à l’ombre des arbres des mets délicieux (végétariens) préparés sur place à partir des récoltes du jardin. Celui-ci ressemble à ce que devait être le jardin d’Eden, mêlant légumes et fleurs, petits bosquets et arbres fruitiers. Le jardinier, aussi roux que sec, s’emploie tous les jours à le rendre florissant, rejoint de temps à autre par sa femme aussi petite qu’un Lilliputien et discrète comme une souris.
J’y ai passé des étés merveilleux, en stage avec mon prof de Taï Chi marseillais et sa compagne, enseignante de Shiatsu près de Grenoble. L’odeur du pain préparé par le boulanger maison, la saveur des salades fraîches arrosées de tamari et saupoudrées de gomasio, le moelleux de l’herbe sur laquelle nous nous étendions pour recevoir les katas de shiatsu, le son des cloches de l’abbaye égrenant toutes les heures dès le lever du soleil, les regards et sourires bienveillants de nos hôtes veillant à notre confort, les séances de « pluches » dans la cuisine collective et le grand feu autour duquel se réunissait tous les soirs la communauté pour parler des petits et grands événements de la journée et partager les pensées personnelles.
Entre vie intérieure et projets de société
Au-delà de la douceur de vivre, tout un chacun a aussi la possibilité d’ouvrir son esprit à d’autres visions du monde et d’autres formes de rapports humains : en écoutant le témoignage d’un membre de l’Arche, en achetant l’un des livres de Lanza del Vasto dans la petite librairie près du jardin, ouverte uniquement de 14 à 16 heures, ou en discutant avec tous les voyageurs de passage qui posent ici leurs valises pour quelques jours ou pour plusieurs mois en échange de leur participation aux travaux collectifs, Mexicains, Espagnols, Allemands, Croates…
Loin d’être coupée du monde, la communauté est en recherche permanente, ouverte sur l’extérieur : mise aux normes des bâtiments, construction de nouvelles salles de pratique, organisation de conférences éclairantes (parmi lesquelles un séminaire de Frédéric Lenoir), enrichissement des pratiques communautaires par les deniers apports des sciences sociales. Il y a quelques années, un nouveau programme a vu le jour : la FEVE, qui forme des personnes souhaitant développer des projets de vie collectifs.
© Arche de Saint-Antoine
En savoir plus sur l’Arche de Saint-Antoine
http://www.arche-de-st-antoine.com/
À lire
Le pèlerinage aux sources,
par Lanza del Vasto